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diaspora des telecom création d'opérateurs
Date Communiqué de Presse : 12 décembre 2025

En partenariat avec Bisatel Telecom

Ces entrepreneurs qui créent des opérateurs mobiles pour leur pays d’origine depuis Paris

Depuis la France, une nouvelle génération d’entrepreneurs issus de la diaspora africaine se lance dans la création d’opérateurs de téléphonie mobile virtuels pour connecter leurs pays d’origine. Une tendance qui répond à un double enjeu : démocratiser l’accès aux télécommunications sur le continent et créer des ponts économiques durables entre l’Europe et l’Afrique.

Le secteur des télécommunications africain connaît une transformation profonde, portée par des acteurs atypiques : les membres de la diaspora installés en Europe. Ces entrepreneurs, souvent formés dans les écoles françaises et dotés d’une connaissance intime des réalités de leurs pays d’origine, développent des solutions innovantes pour répondre aux besoins de connectivité du continent. Des acteurs spécialisés dans l’accompagnement à la création d’opérateurs télécoms émergent pour faciliter cette transition entrepreneuriale et technique.

Un marché africain en pleine effervescence

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon le rapport Ericsson Mobility Report 2023, le nombre d’abonnements à la téléphonie mobile en Afrique subsaharienne devrait atteindre 1,1 milliard d’ici 2028, contre 940 millions en 2023, soit un taux de croissance annuelle composée de 3%. L’Association mondiale des opérateurs de téléphonie (GSMA) va plus loin en prévoyant 1,36 milliard de connexions mobiles d’ici 2030, avec un taux de croissance annuel de 4,3%.

Cette dynamique s’observe particulièrement dans les marchés francophones. L’Égypte compte désormais 120 millions d’abonnements mobiles, le Nigeria dépasse les 160 millions malgré une correction récente liée aux vérifications d’identité, tandis que la République démocratique du Congo affiche 63,9 millions d’abonnements actifs fin 2024 selon l’Autorité de régulation des postes et télécommunications du Congo (ARPTC). Le taux de pénétration mobile en RDC a atteint 62% au deuxième trimestre 2024, témoignant d’un marché encore loin de la saturation et donc riche en opportunités.

L’Union internationale des télécommunications (UIT) souligne néanmoins que seulement 37% de la population africaine utilise Internet en 2023. Ce déficit d’usage, combiné à des tarifs souvent élevés et une couverture inégale, crée un terreau fertile pour l’émergence de nouveaux opérateurs capables de proposer des offres plus adaptées aux réalités locales.

Le modèle MVNO : une porte d’entrée accessible

Les MVNO, ou opérateurs de réseau mobile virtuel, représentent une alternative stratégique pour les entrepreneurs qui souhaitent se lancer dans les télécommunications sans les investissements colossaux qu’implique la construction d’infrastructures physiques. Comme le rappelle l’Agence Ecofin, on compte près de 800 MVNO dans le monde, mais quasiment aucun en Afrique, ce qui constitue une anomalie au regard du potentiel du marché continental.

Le modèle MVNO permet d’utiliser les capacités des opérateurs détenteurs de licences (MNO) pour commercialiser ses propres services de téléphonie mobile. Trois configurations existent : la licence de marque, le light MVNO et le full MVNO, chacune nécessitant des investissements et des compétences différents. Cette flexibilité rend le secteur accessible à des entrepreneurs disposant de budgets limités, parfois à partir de quelques milliers d’euros seulement.

Pour les membres de la diaspora souhaitant se lancer, des programmes d’accompagnement et de coaching spécialisés dans la création d’opérateurs télécoms permettent d’acquérir les compétences nécessaires et de bénéficier d’une infrastructure technique clé en main. Ces solutions en marque blanche éliminent les barrières à l’entrée traditionnelles du secteur.

La diaspora africaine, force économique majeure

Le député Patrice Anato, président du Forum des Diasporas, rappelle que la diaspora africaine en France représente 3,6 millions d’individus et génère annuellement 10 milliards d’euros de transferts vers le continent africain. Ce positionnement fait de la diaspora française un financeur majeur de l’Afrique, devant de nombreuses institutions de développement.

Une étude menée par le Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA) révèle que 71% des Français de la diaspora africaine sont prêts à s’engager dans un projet en lien avec leur pays d’origine. Ce taux monte à 76% chez les 18-24 ans, génération particulièrement désireuse de valoriser sa double culture à travers une activité économique. L’entrepreneuriat représente désormais la forme d’engagement privilégiée pour 44% des personnes interrogées, devant l’associatif.

Le programme MEET Africa, mis en œuvre par Expertise France avec le soutien de l’Union européenne et de l’Agence française de développement, illustre cette volonté d’accompagner les talents de la diaspora. Doté de 8,5 millions d’euros, il vise l’accompagnement technique de 140 entrepreneurs et le financement de 170 projets entre l’Europe et six pays africains : Tunisie, Maroc, Sénégal, Côte d’Ivoire, Mali et Cameroun.

Paris, hub stratégique pour l’entrepreneuriat télécom africain

La capitale française s’impose comme un carrefour naturel pour les entrepreneurs de la diaspora souhaitant investir dans les télécommunications africaines. Plusieurs facteurs expliquent ce positionnement stratégique : la présence d’une importante communauté africaine francophone, l’existence d’écosystèmes d’accompagnement structurés, et la proximité avec les marchés cibles.

Le Tour de France de l’entrepreneuriat des diasporas, organisé par le CPA entre 2020 et 2021 à Bordeaux, Lyon, Marseille et Paris, a permis d’identifier les besoins et attentes des entrepreneurs de la diaspora. Parmi les solutions déployées figure notamment la communauté PASS Africa/EuroQuity, destinée à connecter les écosystèmes de l’entrepreneuriat européens et africains.

L’Institut de recherche pour le développement (IRD) et Campus France participent également à cet effort d’accompagnement, notamment dans le cadre du consortium européen qui a formé et soutenu des dizaines de projets de création d’entreprise portés par des diplômés africains de l’enseignement supérieur français et allemand.

L’essor de l’eSIM : une révolution technologique

La technologie eSIM (embedded SIM) constitue une rupture majeure dans le secteur des télécommunications. Elle permet la fourniture de services à distance, autorisant les consommateurs à télécharger, changer ou supprimer leur profil chez de multiples opérateurs sans nécessiter l’utilisation d’une carte SIM physique. Pour les entrepreneurs de la diaspora, cette innovation simplifie considérablement la logistique et réduit les coûts d’entrée sur le marché.

Les solutions SIM et eSIM internationales permettent désormais aux entrepreneurs de proposer des services de connectivité mondiale sans infrastructure physique locale. Cette dématérialisation ouvre des perspectives inédites pour toucher simultanément les marchés africains et la diaspora européenne, créant des synergies économiques transfrontalières.

Le rapport The Mobile Economy 2025 de la GSMA anticipe près de 800 millions de nouveaux abonnés à l’internet mobile dans le monde d’ici 2030, dont 35% en Afrique. Six pays africains figurent dans le top 15 mondial des marchés à plus forte croissance : Nigeria (38 millions de nouveaux abonnés), Éthiopie (19 millions), Angola (18 millions), Égypte (15 millions) et RDC (15 millions).

Défis réglementaires et perspectives

Le développement des MVNO en Afrique se heurte encore à des obstacles réglementaires. Comme le souligne l’analyse de Didier J. Mary, expert du secteur, les opérateurs historiques regardent souvent ces nouveaux acteurs avec inquiétude, les percevant comme des concurrents plutôt que comme des partenaires de développement du marché. Cette vision restrictive freine l’adoption de cadres réglementaires favorables aux MVNO sur le continent.

Pourtant, l’expérience européenne démontre que les MVNO contribuent à dynamiser la concurrence et à faire baisser les prix pour les consommateurs. En France, des opérateurs comme Bouygues Telecom, initialement réticents, sont devenus des acteurs incontournables pour les MVNO. Cette évolution pourrait servir de modèle pour les régulateurs africains.

L’UIT recommande une approche à trois volets pour améliorer la connectivité africaine : combler le déficit de couverture, réduire les prix d’accès pour les rendre abordables, et développer les compétences numériques des populations. Les entrepreneurs de la diaspora, par leur connaissance des deux mondes, sont particulièrement bien placés pour contribuer à ces objectifs.

Un écosystème d’accompagnement structuré

L’Agence française de développement (AFD), BPI France et Business France ont développé des programmes spécifiques pour soutenir l’entrepreneuriat de la diaspora vers l’Afrique. Le dispositif Choose Africa, bien qu’encore insuffisamment orienté vers les petites structures selon certains observateurs, témoigne d’une prise de conscience institutionnelle de l’importance économique de ces initiatives.

Le programme Entrepreneuriat pour tous, qui bénéficie aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, intègre désormais un volet spécifique pour les entrepreneurs de la diaspora. Les CitésLab sont sensibilisés aux spécificités de l’entrepreneuriat en lien avec l’Afrique, afin de mieux accompagner ces profils particuliers.

Pour les entrepreneurs souhaitant concrétiser leur projet, des solutions complètes de téléphonie mobile permettent de lancer rapidement une activité d’opérateur virtuel, en bénéficiant d’une infrastructure technique éprouvée et d’un accompagnement personnalisé.

Le phénomène de la diaspora télécom illustre une mutation profonde des relations économiques entre la France et l’Afrique. Loin des schémas traditionnels d’aide au développement, ces entrepreneurs construisent des ponts commerciaux durables, créateurs de valeur des deux côtés de la Méditerranée. Le secteur des télécommunications, par sa capacité transformatrice et son potentiel de croissance, constitue un terrain privilégié pour cette nouvelle génération d’acteurs économiques.

À mesure que les cadres réglementaires africains évolueront pour accueillir les MVNO, et que les technologies comme l’eSIM se démocratiseront, les opportunités pour les entrepreneurs de la diaspora ne feront que croître. Paris restera un hub stratégique pour ces initiatives, grâce à son écosystème d’accompagnement et sa position de carrefour entre l’Europe et l’Afrique francophone.

Sources et références
  • GSMA – The Mobile Economy 2025 et rapports annuels sur l’économie mobile en Afrique subsaharienne
  • Ericsson Mobility Report 2023 – Perspectives de la téléphonie mobile mondiale
  • Union internationale des télécommunications (UIT) – Global Connectivity Report 2022 et Facts and Figures 2023
  • Autorité de régulation des postes et télécommunications du Congo (ARPTC) – Observatoire du marché de la téléphonie mobile T2-2024
  • Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA) – Tour de France de l’entrepreneuriat des diasporas et de la diversité 2020-2021
  • Expertise France – Programme MEET Africa 2, financé par l’Union européenne et l’AFD
  • Campus France – Programme MEETAfrica d’accompagnement à la création d’entreprises
  • Agence Ecofin – Analyses sectorielles sur les télécommunications africaines
  • Commission du haut débit de l’UIT – The State of Broadband 2023
  • Forum des Diasporas – Données sur les transferts financiers de la diaspora africaine en France
  • Service européen pour l’action extérieure (EEAS) – Programme MEET Africa 2
  • Banque mondiale – Perspectives économiques mondiales 2024